Lidwine – Les Embellies
Dans le cadre du festival des Embellies, l’artiste Lidwine est venu jusqu’à l’UBU, avec sa voix magnifique, sa harpe et sa bonne humeur. RennesMusique a même pu lui poser quelques questions !
– Lidwine, c’est ton vrai prénom ou un pseudo ?
« Oui, oui, c’est mon vrai prénom. Sainte Lidwine est une sainte hollandaise. D’ailleurs nous n’avons pas d’origine hollandaise… C’est mon père qui avait lu quelque part que c’était une femme de petite vertu, à la base, et il trouvait ça super drôle. Mais ça, ça doit être sa version, parce qu’on ne la retrouve nulle part ! En vérité, c’est une sainte qui n’a pas eu une vie très drôle : elle a eu un accident très jeune, sur un lac gelé, elle a passé des années et des années sur un lit, à perdre l’usage de ses membres un à un, elle était extrêmement pieuse, elle recevait des gens, tout en souffrant le martyre… – C’est joyeux… Oui ! C’est beaucoup moins rigolo que la version de mon père, bien qu’elle n’existe pas ! *rire*
– Donc il n’y a pas de rapport avec le dessinateur français de BD ?
« Pas du tout ! Ce monsieur a prit un prénom de femme ! *rire*
– Si tu devais décrire ton univers en quelques mots, ça serait lesquels ?
« Oulà, c’est une question difficile pour moi… Tout ce que je peux dire c’est que musicalement j’essaye des choses différentes. Je suis très attachée à l’émotion mais aussi à des formats plus classiques « couplet-refrain », mais c’est également intéressant de sortir de ces formats là, essayer d’être cohérent sur des chansons de 4 à 5 minutes, plus pop. Après, en terme d’univers… C’est peut-être plus aux autres de trouver les mots pour le décrire ?
– Si par exemple, on te parle de « mélancolie » ?
En fait, l’album est prêt mais ce qui est actuellement disponible sur internet n’est pas représentatif de tout l’album, qui est aussi parfois plus rythmé, plus électronique. Il n’y a pas que de la mélancolie dans ma musique, et c’est pareil pour moi d’ailleurs. Dans la vie, on peut être très heureux, tout en étant très ancré dans la vérité, dans la réalité… Tout n’est pas blanc ou noir, c’ n’est pas manichéen. C’est pareil pour la musique. »
– Tes clips ont un côté « kaléidoscopique », par exemple celui de « A résonance of myself », c’est un thème récurrent chez toi ?
Pour ce clip, c’est Jérôme Lefdup qui s’en est chargé, je lui ai laissé carte blanche et au final je trouvais que ça collait bien à ma musique. Ou alors je tourne des images que je donne ensuite à quelqu’un, par exemple à une réalisatrice hollandaise que j’aime bien, qui travaille beaucoup en surimpression. Après ça date un peu pour moi ces clips là, de 2010, d’autres vont être tournés pour l’album. Mais c’est marrant que tu parles de kaléidoscope parce qu’il va justement y en avoir sur un des clips, le premier qui sortira !
«
– Qu’est-ce qui t’inspires ? Que ça soit en musique, cinéma, peinture…
Je ne suis pas quelqu’un de très visuel, je vais plutôt être inspirée par des textes par exemple. Comme une phrase dans un livre qui va faire échos en moi et va faire naitre une chanson. Mais ça part surtout de mes propres expériences, c’est très centré sur ma personne. Parce que j’ai l’impression que si je parlais des autres, ça serait comme de les juger, alors que le sujet que je connais le mieux, celui que je peux le mieux juger, c’est moi-même au final. Ce qui m’inspire le plus, c’est le son. Juste de prendre un instrument, en sortir une note et avoir envie de poser ma voix dessus. C’est un besoin instinctif d’exprimer des choses à partir de là. Ça ne vient pas beaucoup de l’extérieur au final.
Ça permet une mise à distance avec ce qu’on vit, ça nous permet de respirer, et de prendre le contrôle
– La musique est cathartique pour toi ?
« Complètement ! C’est vital. Comme pour beaucoup des musiciens, pour pas dire tous. Si on est créé, c’est avant tout pour ça. Ça permet une mise à distance avec ce qu’on vit, ça nous permet de respirer, et de prendre le contrôle sur tout ça. On reprend le contrôle sur cet amalgame qu’on a l’intérieur. »
– Il y a quelque chose de très pictural dans les photos réalisées pour ton album, c’est un choix de ta part ? Je travaille avec la même personne depuis un moment, Thierry Rateau, un ami photographe, qui a un travail vraiment particulier, que j’aime beaucoup. Pour le moment, je ne lui ai pas fait faux bond. Je pense que pour faire des jolies choses, c’est bien d’être en confiance dans ses collaborations.
– Tu es une musicienne multifonctions et autodidacte, raconte-nous un peu tout ça.
« Ça fait 4 ans que je fais de la harpe, c’est assez récent. Je me sens encore un peu stressée par rapport à cet instrument, alors que la voix je n’ai pas peur du tout. J’aime bien les instruments atypiques, ça m’inspire. Et j’aime le côté « résonance » de certains instruments, comme pour le piano. Et avec les instruments un peu bizarres, on peut faire un peu comme on veut avec en fait. Par exemple, le premier que j’ai eu était un harmonium indien, que j’amène sur scène, et quand je commence à jouer avec, j’ai tout de suite envie de mettre ma voix dessus. Pour la harpe, c’est un ami qui m’en a parlée et je me suis trouvée à l’aise avec l’objet. Le fait de l’avoir dans les bras, cette posture… Si je devais choisir un instrument « sérieux », ça serait le violoncelle par exemple, y’a un côté très charnel dans sa pratique. »
– Tu as commencé la musique jeune ou pas du tout ?
« Pas du tout ! J’ai du faire 6 mois de piano à 13 ans, un an de chant lyrique à 18 ans… J’ai vraiment commencé à bidouiller sur séquenceur à 24 ans, dans ma chambre, et c’est en 2010 que je m’y suis mise sérieusement, au moment des premiers EP. Pour la voix, ça ne s’est pas fait tout seul. J’ai tellement fait de bêtises avec ma voix quand j’étais plus jeune, à chanter sur des disques, sous la douche et en soirée, que je me suis retrouvée avec deux nodules sur les cordes vocales et j’ai du aller voir un prof de technique vocale pour ne pas perdre ma voix. J’ai commencé une rééducation avec lui et au bout de 4 mois, j’ai récupéré ma voix normale. Mais j’ai continué à travailler avec lui finalement. Si bien que je l’ai énormément bossé, que je la travaille toujours tous les jours, je l’entretiens… Comme un muscle. «
– Ta voix ressemble beaucoup à une autre artiste, Islandaise.
« On associe souvent ma voix à celle de Björk, oui. Mais la grosse différence avec elle c’est que j’utilise plus le vibrato, alors qu’elle, elle est très droite dans sa voix. »
– Mais complètement ! Et j’ai vu que tu avais enregistré un EP de 5 titres dans une église (St Merry) à Paris ? Pourquoi ce choix ?
« Quitte à enregistrer des musiques minimales, autant le faire dans un espace minimal, et c’est un vrai plaisir de faire ça dans une église. Il y a une résonance, on entend le son monter, on peut davantage jouer avec les silences… J’adore chanter dans ce genre d’endroits. Je l’ai aussi fait, dans la même église, pour le festival « les femmes s’en mèlent ». Je suis plus habituée à ça qu’à la scène. Chez moi, je chante en acoustique, et il faut s’habituer aux retours sur scène, à cette manière d’entendre le son… En église, ce n’est pas du tout la même chose, c’est plus naturel. »
– C’est marrant parce que t’as un prénom de sainte, tu aimes chanter dans des églises… Coïncidence?
*rire* Je ne suis pas du tout obsédée par la religion ! J’aime bien les églises, mais en dehors des messes ! Après, j’aime le fait que ça soit un lieu, qui, dans n’importe quelle ville, inspire le silence et le calme. Ce sont des lieux qui ont été construit pour les voix, qui sont beaux, qui sont comme des cocons, qui inspirent la paix… Et puis en été, quand il fait super chaud dehors, dans une église, il fait bien frais et ça c’est cool !
– Tu as eu le temps de visiter un peu la ville de Rennes ? Tu connais la scène rennaise ?
« Je me suis promenée ce matin au Thabor, et hier soir on a mangé dans une crêperie ! Mais je n’ai pas eu le temps de faire plus… Et je suis quelqu’un qui va peu en concert en plus… Je n’ai jamais autant été en concert que pendant la tournée d’ailleurs, et c’est ma première fois à Rennes ! Mais je reviens le 24 avril à l’Antipode, je réviserai pour la prochaine interview ! *rire* »
– Si tu pouvais jouer avec n’importe quel artiste ou groupe, vivant ou mort, ça serait qui ?
« Je serais plus intéressée par de la collaboration avec de la musique traditionnelle, comme des chants bulgares ou des musiciens indiens. »
– Ton meilleur et ton pire souvenir de concert ? Que ça soit comme spectateur ou artiste.
_ »Comme spectatrice, j’ai beaucoup aimé le concert de Peter Gabriel, sa dernière tournée, avec l’orchestre philharmonique de Radio France. Il y avait une partie avec ses vieux titres et une autre avec des plus récents. J’ai beau peu connaitre son travail, j’ai vraiment apprécié, j’avais presque les larmes aux yeux pour les deux premiers morceaux. Pour le pire souvenir… Mais moi je trouve ça drôle en fait : un concert à Reims cet été, ou il n’y a eu que des problèmes techniques à la suite. L’ordinateur n’était pas branché, pas de jack dans la harpe, l’igné’ son qui s’engueule avec le mec à l’ordi’, à un moment les séquences ont disparu donc je suis descendue avec ma harpe dans l’amphithéâtre et tout a repris à la fin du morceau, donc ce fût un flop. Je remonte avec ma harpe et là un énorme bourdon se pose sur ma main, donc j’attendais qu’il parte sans bouger *rire* J’étais épuisée ! Les gens ont adoré au final, mais j’étais épuisée ! »
– On n’y pense pas assez aux bourdons ! *rire* Le mot de la fin ?
J’ai hâte que l’album sorte ! Il est tellement représentatif de ce que je suis en musique que j’ai hâte d’avoir les réactions par rapport à lui. Le premier titre devrait sortir début mai et l’album en entier fin mai normalement. Vivement !
– Un grand merci à toi !
Propos recueillis par Sophie Barel
Photo du concert par Philippe Remond