Bumpkin Island : « Thomas Poli a apporté une certaine maturité à notre live. »
Les Bumpkin Island viennent de sortir leur second album « All was bright ». Ils étaient en concert vendredi dernier dans le cadre du festival des Embellies. Nous avons pu les rencontrer et discuter avec eux de leur actualité musicale.
Rencontre avec Vincent et Jérémy.
Vous vous connaissiez par le réseau associatif mais comment est né Bumpkin Island ? Dans un grenier au milieu de la Bretagne dans un home studio c’est ça ? D’où votre nom ?
Vincent : oui on s’est connus par l’associatif via une radio créée par plusieurs jeunes dans le centre Bretagne. Quant au projet lui-même, au départ c’est Glenn, qui fait notre son maintenant, qui a commencé à faire des morceaux tout seul. Il a eu envie de faire venir des chanteurs et des chanteuses avec lui et c’est comme cela qu’on a commencé à participer aux compositions.
On avait dix morceaux et on a donc décidé de faire de la scène en 2011, ce qui n’était absolument pas notre idée de départ. A la base c’était vraiment un projet de studio.
Jérémy : pour le nom, rien à voir avec notre lieu de création. Ellie, notre chanteuse, avait passé du temps à Boston et c’est une île qui se trouve là-bas, elle existe vraiment.
Vous venez de sortir « All was bright » votre second album. Votre album précédent est sorti il y a 3 ans. Entre temps, vous avez fait des expériences musicales avec vos 2 EP ? Cela vous a permis d’expérimenter l’écriture à 6 avant de commencer l’album, de trouver votre son, votre texture ?
Jérémy : le premier album a été réalisé par Glenn. Ensuite, il a décidé de changer de casquette et de ne plus être dans la création. On avait envie de continuer le projet à nous six. Et, effectivement, au niveau des couleurs, du son, on ne se voyait pas faire un album directement. On avait besoin d’expérimenter et on avait pas envie d’attendre plusieurs années sans rien sortir non plus.
On voulait continuer de se confronter à la scène, on a donc eu l’idée de sortir un EP chaque été. On s’enfermait une semaine dans notre local au Sud de Rennes dans le but de sortir un disque à la fin.
Ces 2 EPs nous ont permis de tester la scène dans des réseaux différents, vers l’Est de la France, en Belgique. On voulait aller tester notre son loin de chez nous, là où on ne nous connaît pas. Cela a crée une unité dans le groupe, une évolution naturelle de notre son. Cela est devenu ensuite évident d’écrire un album.
Vous créez comment à 6 ? Vous partez de la ligne de voix d’Ellie qui est pour moi un élément central de votre musique ? Vous vous faites des bœufs pour retenir des bouts d’impro ?
Vincent : il n’y a pas de choses figées dans le processus. Justement, nos deux EPs précédents nous ont aussi permis d’expérimenter notre façon de travailler, de créer. On a réussi surtout à trouver une symbiose, ce qui fait qu’aujourd’hui, c’est beaucoup plus simple d’écrire, de composer. Les morceaux se construisent plus naturellement mais cela part généralement de la musique et non de la voix. Il y a eu des morceaux amenés par certains membres où chacun retravaille derrière pour apporter sa touche. Il y a eu aussi des morceaux faits à partir de répétitions, à partir d’une page blanche où on joue et à un moment donné il y a quelque chose de bien qui sort et on enregistre. On n’a pas de processus.
La seule chose figée c’est qu’on est six et qu’on compose tous les six !
Justement, comment vous faites à 6 (vous étiez 9 au début avec 2 chanteuses) pour vous entendre sur les sons, les couleurs ? Vous avez des vécus et des influences différentes, cela doit être plein de compromis non ?
Jérémy : il faut très bien se connaître !
Vincent : les années font que c’est beaucoup plus simple. Chacun accepte mieux le compromis. On a une méthode de travail qui évite la frustration sur un morceau. Les choses se passent sans clash !
Jérémy : si il y a une personne qui n’est pas convaincue, on va tout faire pour la convaincre (rires).
C’est Ellie qui écrit les textes en anglais. Elle est libre sur l’écriture ? Les autres membres lui donnent leur avis ? L’écriture vient à quel moment ?
Vincent : la personne qui a la charge du chant dans le morceau prend la charge du texte, donc Ellie pour la plupart du temps. Elle a une totale liberté sur l’écriture et est beaucoup plus à l’aise que nous avec l’anglais (elle est anglosaxonne). Le morceau « Spectacular Lives » a été écrit par Ellie et Clément.
Jérémy : elle a une approche qui nous correspond. L’anglais sonne et se joue d’une façon différente, et cela correspond tout à fait à notre musique. On enregistre parfois des morceaux et les textes ne sont pas encore finis, cela se fait souvent bien après.
Après Birgir Jon Birgisson qui a mixé votre 1er album (et celui de Sigur Ros), vous avez choisi de travailler avec Thomas Poli, collaborateur de Dominique A, Miossec, Yann Tiersen et Laëtitia Sheriff. Pourquoi et comment avez-vous travaillé avec lui ? Que vous a-t-il apporté ? Plus de cohérence ?
Vincent : on a choisi Thomas Poli, tout d’abord parce qu’on le connaissait assez bien. On savait qu’humainement, cela passerait et c’est super important car c’est un processus long et usant moralement. Au delà de ça, on connaît son travail et on savait que cela aurait été de qualité.
Jérémy : tous nos morceaux étaient nouveaux, c’était bien d’avoir quelqu’un pour les découvrir et donner son avis.
On avait une grande confiance en Thomas Poli, il a été le dessinateur de notre album.
Avant cela vous étiez très DIY. Cela vous a permis de changer certaines choses, d’améliorer votre approche le fait d’avoir un point de vue extérieure ?
Jérémy : cet album est plus live, plus rock. Avant c’était plus des albums produits. On sait qu’il travaille beaucoup comme cela, en méthode « live ». Il nous a apporté beaucoup de confiance. Quand on jouait ensemble, on jouait les bases en live et il nous conseillait par rapport au futur. Il savait anticiper les choses. Thomas Poli nous a apporté une certaine maturité du live.
Le fait d’avoir enregistré cet album en live dans un théâtre vous a donc permis d’enregistrer un album plus proche de ce que donnerez sur scène ?
Jérémy : il y a moins d’adaptation pour le live effectivement. Ce sont les bases qui ont été faites live. Pour le reste, on s’est permis de rajouter six ou sept guitares si il fallait, plein de synthé, etc…
Le live sera plus proche du disque mais on a quand même réarrangé des choses pour qu’il y ait encore plus d’énergie.
En plus de tout ce travail, vous avez récemment fait une résidence de plusieurs jours à l’Ubu. Qu’est-ce qu’il en est ressorti ?
Vincent : le but était de tout calibrer au niveau du son. Etant donné que ce ne sont que des nouveaux morceaux avec des machines qu’on n’a pas forcément beaucoup utilisée avant, la résidence était nécessaire. On a quasiment eu l’impression de démarrer un nouveau projet. On devait réajuster tous les morceaux. On a aussi pu pointer les dernières choses qui n’allaient pas sur scène et un travail détaillé sur la lumière.
Jérémy : on ne joue qu’un seul ancien morceau dans le set. On a travaillé un vrai set où on ne sort pas de notre univers, où tout est homogène. Il y avait peut-être des choses un peu plus décousues avant quand on jouait nos deux EPs et un peu de notre premier album car tout n’allait pas forcément ensemble. On avait besoin de remettre tout à plat !
C’est quoi le son Bumpkin Island aujourd’hui ?
Vincent : aujourd’hui, on fait de la pop. On se placerait dans du Radiohead, du Grizzly Bear, du PJ Harvey.
Jérémy : on se définit par nos six entités, chacun a un son propre. Si on prend les guitares de Bumpkin Island, Thibaut et Vincent ont deux sons clairement identifiables.
C’est le temps qui fait que notre son se définit. On ne s’est jamais dit qu’on voulait « faire comme ».
Il y a un clip qui va sortir bientôt réalisé par Pierre Mottron. Vous pouvez m’en dire plus ? C’est sur quel titre ?
Vincent : ça sera le clip de « Spectacular Lives ». Pour Pierre Mottron, c’est Ellie qui était en contact avec lui, ça va donc être dur de t’en dire plus.
Jérémy : on voulait que notre musique inspire des gens en dehors de notre groupe. On a vu le travail de Pierre via Internet, Ellie l’a donc contacté pour réaliser un clip. Il a eu carte blanche sur le clip. On l’a découvert il y a 2 jours mais on ne sait pas encore quand il va sortir !
L’artwork de votre album est de Raphael Decoster. Vous l’avez rencontré comment et pourquoi ce choix ? Je dois dire que ce visuel est magnifique.
Jérémy : j’ai rencontré Raphael en juin dernier. Je fais aussi de l’enregistrement en studio et j’ai enregistré son disque. Pendant qu’il enregistrait, il dessinait pour un autre groupe. C’était au moment où nous on cherchait quelqu’un. Je ne savais pas qu’il était plasticien. Quand j’ai montré son travail à tout le groupe, tout le monde était d’accord pour travailler avec lui sur l’artwork de notre album. Il a eu, lui aussi, carte blanche. On lui a envoyé nos premiers enregistrements pour qu’il s’inspire. La première chose qu’il a dessiné, c’est un oiseau de dos. En réalité il doit faire au moins 2 mètres de haut.
Ma dernière question concerne Rennes et la musique. Votre dernier coup de cœur rennais ?
Jérémy : Born Idiot ! J’adore !
Vincent : moi je dirais Jjunior, il vient de sortir un EP electronica, hip-hop.
Merci Vincent et Jérémy.
Propos recueillis par Cath
Crédit photo : Lise-Gaudaire
FESTIVAL LES EMBELLIES
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