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Comptoir d’été #5 : le Melody Maker

Pendant la trêve estivale, rennes musique vous propose de découvrir ces bistrots rennais où les amateurs de bonne musique aiment traîner leurs oreilles. Ces bistrots où l’on aime découvrir des artistes, ces bistrots où l’on aime se retrouver autour d’une passion commune, ces bistrots où l’on se sent chez soi…

Episode 5 : rencontre avec Jean Noël du Melody Maker

C’est quoi l’histoire du Melody Maker ? Depuis combien de temps on vient écouter de la musique chez toi ?
Il y a une vingtaine d’années, j’ai quitté le monde de la musique car je n’arrivais pas à y trouver ma place et le milieu était très particulier. Je ne rencontrais pas les bonnes personnes qui me donnaient envie de monter quelque chose. J’ai donc fait du bistrot alimentaire pendant 15 ans. Et puis, j’ai recroisé dans la rue des jeunes qui portaient des T-shirts des Pink Floyd, de Jimi Hendrix, d’AC/DC… J’ai senti le retour du rock, le retour de la guitare… J’ai eu l’opportunité de racheter ce lieu. A l’époque, c’était un bar électro, reggae, qui s’appelait le P’tit Bazar. Dès le début je me suis dit que j’allais axer cet endroit sur le garage, le post-punk, les musiques que j’aime en fait. J’ai pris le risque de changer de thématique. Le lieu est vraiment fait pour. Par contre je ne connaissais personne. J’ai donc été à la rencontre de la nouvelle génération, et tout s’est fait petit à petit. Je suis de Rennes pourtant mais j’avais décroché. A Rennes c’est très « catégorisé « , les musiques ne se mélangent pas trop. Les publics sont catalogués et ne se mélangent pas, c’est une caractéristique de Rennes. A Bordeaux, par exemple, tout le monde s’entend et se mélange dans les bars. Une fois que tu sais ça tu t’y fais. J’ai donc ouvert mon bar il y a plus de six ans et je l’ai appelé le Melody Maker, en hommage au magazine qui a eu ses heures de gloire dans les années 60, avec les Who, les Mods, le début des Skin, ces années garage, soul, sixties que j’aime.

Qu’est ce qu’on écoute au Melody ?

Du rock, du garage, du sixties, du post-punk. C’est ma génération et ma came tout ça !

Parmi tous tes concerts, est-ce qu’il y en a un qui t’a marqué ? Ton meilleur souvenir ?
Le meilleur concert que j’ai proposé ici ? Les Yussuf Jerusalem. Ils flirtaient avec le métal, le garage, la musique moyenâgeuse. Il y avait vraiment quelque chose qui ressortait de bon dans tout ça ! Une très bonne énergie, quelque chose de dark, de mélancolique.

Qu’est-ce que ça t’apporte le Melody Maker ?
Personnellement, beaucoup d’ennuis… Quand tu es patron de bistrot, tu n’existes pas humainement. Mais ça t’apporte aussi plein de rencontres. Il faut bien comprendre que je suis complètement extérieur à ce qui se passe dans mon bistrot. Moi, je regarde juste si tout se passe bien pendant les soirées, mais la soirée, ça n’est pas moi qui la fait. Je met la salle à dispo, donc moi, je suis la personne qui s’occupe du reste. Je ne suis donc pas à fond dans le concert. La soirée doit vivre d’elle-même, ce sont les clients qui vivent le concert. Je ne fais donc pas vivre quelque chose, c’est le concert, la qualité du groupe qui font vivre la soirée et le Melody. Le plaisir pour moi, c’est de voir que les gens se font plaisir. Tu ne peux pas faire ce métier sur le long terme si tu sens que les gens s’ennuient, viennent juste comme ça…

Est-ce que tu participes à des festivals sur Rennes ?
Je veux être indépendant. Je travaille avec des assos, on a donc nos festivals à nous, comme Les Tongs et la Pluie avec Banana Juice. Je fais aussi les Trans Off avec les assos. Je bosse sur l’année avec Beating Recording, le Twist Komintern, La Villa Diodati une fois par mois, etc… Les assos proposent leur festival. Dès l’instant où il y a une association, il y a un réseau. Elles participent à la vie rennaise, à la collectivité !

As-tu participé à l’essor de groupes rennais ? Des groupes rennais ont-ils fait leur première scène chez toi ?
Quand je suis arrivé, il n’y avait pas beaucoup de groupes garage. Maintenant, il y a une scène et des gens qui se rencontrent beaucoup. Ca n’est pas moi tout seul qui ait fait cela, on est plusieurs bars sur Rennes, mais ils savent maintenant qu’il y a des endroits pour se produire. Sapin, Kaviar Spécial, Pan… Tout ça crée un lieu où les gens se rencontrent en soirée. Je trouve aussi que la qualité s’est améliorée au fil des années. Plein de groupes ont fait leur première scène ici. Une première scène pour les Flashers, un groupe de garage. Ils ont 17 ans ! Il y a une nouvelle génération qui arrive.


Rencontres-tu des difficultés ? Des plaintes avec le voisinage ou la ville de Rennes ?
J’ai un voisinage qui est compréhensif parce que je ne l’embête pas trop. Je ne fais que des concerts le week-end. Si j’ai l’occasion de faire un concert en semaine, car c’est un groupe qui me tient vraiment à cœur, je le fais en première partie de soirée. A 22h30, c’est fini et mes voisins peuvent dormir pour aller bosser le lendemain. Après, le problème du bruit n’est pas trop devant ou au niveau de la salle, c’est plutôt au niveau de la cour arrière. Donc ma solution : des concerts le week-end ou tôt le jeudi exceptionnellement. J’ai cette chance de ne pas avoir de problème, c’est pour ça que je tiens depuis six ans.

Que penses-tu de la politique rennaise concernant les lieux culturels ?
Je suis tellement indépendant que je ne sais même pas ce qui est mis en place au niveau de la municipalité. Je me débrouille tout seul, je n’ai pas besoin de subventions, donc la politique me paraît loin. Je suis dans une niche.

Quel/s autre/s bar/s à concerts tu aimes sur Rennes ?
Je ne vais quasiment jamais écouter d’autres concerts puisque j’en ai chez moi et qu’on travaille tous en même temps. Quand je sors c’est plutôt pour me reposer et boire un verre tranquillement. J’aime bien aller à la Bernique Hurlante. Ca doit bien faire deux ans que je ne suis pas allé au Mondo Bizarro, faute de temps.

Des conseils pour ouvrir un établissement comme le Melody Maker sur Rennes ? Qu’est-ce que tu aurais aimé savoir avant d’ouvrir ton bar ?
Je savais à quoi je m’attendais puisque j’avais un bistrot avant. Un conseil : essayer de survivre. Pour survivre il faut savoir dire non, ne pas trop en faire. Faire attention à l’emplacement. Après chacun vit son truc mais il faut être sérieux.

J’ai une devise : plus tu fais un truc alternatif, plus il faut être carré.

Ca t’évite plein de problèmes et ça te permet de rester indépendant.

Quel est le budget moyen pour venir écouter un concert chez toi ? Combien coûtent l’entrée et la bière ?
L’entrée, c’est en fonction des assos. Le concert le plus cher qu’on a fait ici c’était 5 euros. En général, ça tourne autour de 3 ou 4 euros. C’est de moins en moins gratuit car ça devient difficile. La bière de base est à 2.50 euros. C’est le même budget partout. Dès l’instant où les cibles sont de la même génération, le budget doit être le même. Les étudiants et les trentenaires ont des petits budgets. Et puis ici on n’est pas à Paris, et tant mieux !

Budget moyen pour votre soirée au Melody Maker :
Une entrée à 4 euros. Vous buvez toujours et encore 3 bières pendant votre soirée car vous êtes toujours aussi responsable : une en arrivant, une pendant le concert et une à la fin pour débriefer avec vos amis. Vous prenez la bière la moins chère car vous étiez hier au Oan’s, avant-hier au Marquis de Sade, samedi dernier au Mondo Bizarro, et vous irez demain au Gazoline. Votre budget devient serré…
Une entrée à 4 euros + 3×2,50 euros de bières = 11,50 euros pour une bonne soirée au Melody Maker.


On pourra encore écouter des concerts au Melody pendant longtemps ? Tu as d’autres envies ? D’autres projets ?

Tout viendra du sentiment que j’ai fait ce que j’avais à faire. Je ne me suis pas encore donné le temps de réfléchir sur mon avenir. Quand je commencerai à me poser des questions c’est que l’idée d’un autre chemin ne sera pas loin. Ca ne sert à rien de durer pour durer. Les Tontons Flingueurs ont duré cinq ans et c’est un mythe à Rennes !

Merci Jean Noël.

Rendez-vous la semaine prochaine pour le comptoir d’été #6 !
Lire l’épisode 4 avec Seb du Oan’s Pub.

Propos recueillis par Lucie et Cath
Crédit photo : Lucie

Le Melody Maker : 14 rue St Melaine à Rennes
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