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Skip&Die, soirée mythique et mystique à l’UBU.

Je vais être honnête.
Je vais avoir du mal à décrire de façon construite le concert de Skip&Die à l’UBU.
On ne lit pas Skip&Die, on ne l’écoute pas sur CD bien pépère dans son canapé.
On le vit. On le vit tellement que j’ai presque envie de dire que ça se mange et que ça se respire.

Un petit récapitulatif pour les absents : le jeudi 11 avril au soir, l’UBU accueillait à nouveau des groupes présents aux dernières TransMusicales.
Il y avait Phoebe Jean & The Air Force (originaires des USA) et Skip&Die (venant d’Afrique du Sud), entrecoupé par le DJ Haze.
Deux groupes portés par des chanteuses charismatiques. La première a réalisé au printemps dernier un premier album « Heartbreakers », de l’electro-funk déjanté mixé à du hip-hop à tendance pop.
La deuxième est Catarina Pirata (voir interview) qui a fondé un groupe en rencontrant le producteur néerlandais Crypto Jori.
Leur musique ? Un mélange de sonorités traditionnelles, électroniques et hip-hop. Pour l’album « Riots In The Jungle » sorti en 2012, ils ont parcouru l’Afrique du Sud et à chaque étape correspond une collaboration de quelques jours avec un musicien local, le temps d’écrire et d’enregistrer un titre en commun.


 

On en revient à la soirée. Alors, en gros, si tu es rennais et que tu es en manque de soleil (tu sais forcément de quoi je parle), c’était là qu’il fallait être.
Avec eux, avec nous.
Oui, parce qu’hier soir, on était davantage un grand Tout, qu’un groupe face à son public. Le sentiment océanique provoqué par le live.
Mon seul regret est de ne pas avoir eu la place pour danser. 
Faut dire que l’espace personnel de chacun était réduit à son minimum.
A tel point que, personnellement, j’ai vu la sueur du mec d’à coté perler sur moi, que j’ai du manger les cheveux d’au moins 6 personnes différentes, et que j’ai même eu un doigt étranger dans ma bouche alors que j’hurlais le nom de la chanteuse (quand t’as vu un mec se curer le nez dans la foule une demi-heure avant, c’est d’autant plus surprenant…).
Tellement proche que si la foule sautait sur place, tu sautais avec elle, même si tu ne le voulais pas. Tellement proche que si la foule « pogotait », tu le faisais aussi. Tellement proche que tu pouvais finir la tête dans l’aisselle du voisin ou dans le chignon de la fille d’en face.
Tu bouges dans la fosse comme dans un tourbillon, tu t’éloignes de ceux, et de ce que tu connais pour mieux y revenir. C’était digne d’un concert punk.
Y’avait même le « meurtrissage » d’orteils, les coups dans les côtes, les mèches de cheveux dans les yeux et les douches à la bière.
Et le pire, c’est qu’on aime ça. Va savoir… Je me demande toujours pourquoi l’UBU n’avait pas précisé qu’on aurait mieux fait de venir en maillot de bain.
Catarina, elle, a tout compris. Elle commence le concert avec un gros sweat digne des années 90 (probablement parce qu’il a plu toute la journée ou presque) pour le finir en haut de maillot de bain, dans la foule, avec son micro.
Au son des percussions traditionnelles et des basses, elle danse et hypnotise le public en ondulant tel un serpent.
L’après-midi même, lors de son interview, elle nous disait « j’aime être mystique », une phrase plutôt énigmatique à ce moment là.
Il a suffit d’attendre quelques heures pour comprendre enfin. Le concert a débuté avec le titre « Jungle Riot », le public chante déjà. La plupart ont déjà du les voir aux dernières TransMusicales, tous ensemble à 4h du matin. Une fois de plus, c’est complet pour eux. L’ambiance se fait plus douce sur « Anti-Capitalista » ou on peut même entendre de la flûte de pan. Le public suit avec « La Cumbia Dictadura » qu’il connait aussi par cœur. De même pour « Love Jihad ». C’est comme si Skip&Die avait toujours été là en France.


 

 

Et vu que j’ai du mal à construire ma pensée autour de ce concert, que je suis plus dans le ressenti, quasiment dans la synesthésie de l’instant, je vais poursuivre avec un questionnaire de Proust (autrement appelé « portrait chinois »).
C’est parti ! Si le concert de ce soir était : Une saison ? L’été. Un été, chaud et humide.
Un évènement climatique ? Une pluie. d’eau ou de bière. Ou les deux en même temps.
Un pays ? L’Afrique du Sud, sans être original, mais un lieu bourré de métissage, un melting-pot humain et musical.
Une couleur ? Rouge, comme le haut de maillot de bain de Catarina, comme les fleurs de son pantalon, comme les joues du public qui sautille et « pogote » sur place.
Une forme ? Une spirale. Ce symbole fort, hypnotique. Et parce que c’est un peu le chemin parcouru dans la fosse, que tu le veuilles ou non.
Un élément ? De l’eau, qui s’insinue partout en soi, qui tombe de la scène, qui perle sur chacun. (Et parce qu’après, on avait super soif)
Un adjectif qualificatif ? Moite.
Un sentiment ? La joie.
Une expression du visage ? Un grand sourire idiot pour nous, un sourire satisfait pour Skip&Die.
Un instrument de musique ? Des percussions. Celles qu’on pouvait voir au fond de la scène, tel des gros tambours de guerre. Ou la voix de la (très) belle Catarina (si ça marche aussi, c’est moi qui décide)
Un mot ? « Mystique », facile. On nous a soufflé le mot à l’oreille aussi… J’ajoute « Charismatique » même.
Une ambiance ? Ce concert était déjà une ambiance à lui tout seul.
 Et voilà. Jean-Louis Brosssard slame dans la foule. Le concert se finit.
L’UBU acclame le public « vous êtes géniaux, vous êtes super ! ».
L’espace d’une soirée, c’était le public rennais, le vrai. Celui dont les légendes bretonnes parlent, la nuit, dans les rues pavées… Il aura fallu une Catarina Pirata et sa joyeuse équipe de Skip&Die pour le réveiller.

Elle a raison. « Y’a du mystique là dedans. »

 

Sophie Barel

©Photo par Philippe Remond

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